news are not always good (noyan & yunseo)

tw: mention importante de mort

Le soleil est haut dans le ciel. Une bonne journée s'annonce. Deuxième samedi du mois de septembre, pas le premier week-end depuis la fin des vacances d'été, donc. N'empêche que Yunseo se sent quand même euphorique. Ça lui avait manqué pendant les vacances, les week-ends. C'est idiot, peut-être. La joie d'avoir deux jours de repos qui est plus grosse que celle d'avoir des vraies vacances. Enfin, "vacances", elle s'était inscrite aux cours d'été de juillet. Mademoiselle s'est réveillée tard, a oublié de faire des courses la veille et il n'y a rien à manger dans le dortoir. Plus qu'à aller à la cafétéria, elle suppose. Alors elle se prépare, descend les escaliers par flemme d'attente l'ascenseur (logique) et sort. Véritable scène de film ou d'anime, elle reste immobile un moment. Juste histoire de sentir la légère brise de midi sur ses cheveux. Les arbres sont encore verts, elle remarque alors qu'elle marche. Ils ne vont pas le rester longtemps, alors elle devrait sûrement prendre le temps de les peindre. Yunseo stoppe soudainement son pas rapide et sort son téléphone. Pourquoi ne pas juste prendre une photo ? Elle fait donc, puis en regardant les arbres avec des étoiles dans les yeux, elle remarque quelqu'un dans le fond de l'image. Elle lève la tête, c'est bien Noyan, de l'autre côté de la route. Elle ne veut pas le déranger, alors elle ne fait rien et continue juste son chemin pour la cafétéria. Ça fait longtemps qu'ils ne s'étaient pas croisé, bien six mois, mais ils auront à nouveau l'occasion de se voir. Yunseo a toujours le numéro de Yerin, la petite amie du gars, de toute manière. S'il marche dans le campus un week-end, c'est sûrement pour aller quelque part. Dans ses souvenirs, il vit à Mapo avec Yerin. Il devait sûrement voir un prof, quelque chose du genre. Toujours dans ses pensées, Yunseo continue son chemin. Elle se souvient plutôt bien de Yerin, étonnement ; elles étaient ensemble dans une des classes de peinture, le semestre dernier. Son pouvoir est de lire les pensées, c'était en général plutôt embarrassant. Quand Yunseo a appris son pouvoir, elle a pensé à quel point elle avait dû entendre des trucs dégueulasses, elle avait répondu à voix haute que oui. Yunseo espère qu'elle se porte bien, mais elle n'a pas de nouvelles. Elle avait essayé une fois, de lui envoyer un dm instagram pour la féliciter de ses un an avec Noyan, elle n'avait pas répondu. Yunseo devait bien l'avouer, elle était un peu vexée. Alors elle n'avait plus essayé. Yunseo repense à ça, puis ça l'attriste un peu, alors elle baisse la cadence de son pas et arrive un peu plus tard que prévu. Sauf que quand elle arrive, elle voit Noyan à travers la vitre de la porte. Peut-être qu'il a déjà fait ce qu'il avait à faire ? Elle se sentirait mal si elle faisait semblant de ne pas le connaître, alors quand elle finit de se servir, elle va s'asseoir à sa table. « Salut ! C'est Yunseo, une amie de Yerin, sauf si j'ai développé des problèmes de vue, t'es Noyan, nan ? » Un grand sourire, elle essaie d'avoir l'air aimable. Elle n'a pas encore parlé de la journée, alors elle toussote un peu et prend une gorgée d'eau. « Je suis plus trop en contact avec Yerin, elle se porte comment ? Vous vivez toujours ensemble ? Dis-moi si je suis indiscrète, hein. »

noyan sort de la salle de réunion. les tuteurs s'étaient réunis aujourd'hui pour réorganiser le club c'est-à-dire choisir les jours les tutorats auront lieu et combien d'étudiants seront confiés à chacun des tuteurs. l'année dernière ils avaient fait l'erreur de donner un trop grand nombre d'étudiants à chaque tuteur et cela avait été une véritable catastrophe. ils s'étaient retrouvé complètement débordés à l'approche des examens. la nouvelle règle désormais est donc pas plus de quatre étudiants par tuteurs. si la demande de tutorats est trop forte, de nouveaux tuteurs seront recrutés et les élèves les plus en difficulté seront privilégiés.

noyan pense rentrer chez lui avant de finalement se décider à se rendre à la cafétéria. il savait que s'il rentrait chez lui il ne mangerait rien ou très peu. son réfrigérateur et ses placards sont majoritairement composés de bières et de repas que sa mère lui apporte mais qu'il n'a même pas la force de réchauffer. cela fait maintenant quelques mois que noyan a perdu l'appétit. lorsqu'il est entouré il se force à manger et à sourire parce qu'il ne veut pas que les gens remarquent sa détresse mais lorsqu'il se retrouve seul il laisse ses vieux démons l'envahir. c'est le pas lent qu'il se dirige vers la cafétéria. il s'installe à une table vide et fixe son plat deux bonne minutes avant de réunir le courage d'avaler la première bouchée. il retient une mine de dégoût puis avale une seconde bouchée.

une fille s'installe en face de lui. il la reconnait mais ne se rappelle plus de son prénom exactement. il sait que ça commence par yun- mais ne se rappelle plus du reste. heureusement elle se présente sans même qu'il n'ait à lui demander de lui rappeler son prénom. ah yunseo! il se rappelle avoir vu yerin discuter avec elle quelques fois après les cours. noyan avait déjà échangé quelques mots avec elle mais rien de plus. "c'est bien moi, oui. je te rassure, ta vue ne te fait pas encore défaut." elle lui demande des nouvelles de yerin et il comprend bien vite qu'elle n'avait pas été informé de la tragédie. le peu d'appétit qu'il avait disparaît complètement et il pose ses baguettes à côté de son plat à peine entamé. ça fait 4 mois bientôt 5 mois qu'elle n'est plus et il a toujours du mal à le dire, à prononcer ces quelques mots à haute voix. parce que ça rend la situation d'autant plus réel. parce que ça lui confirme que la yerin avec qui il a parlé ce matin n'est pas vivante. "yerin est partie." il s'efforce de dire avant de se rendre compte que ce n'est pas assez claire. c'est trop vague. cela pourrait vouloir dire tout et n'importe quoi. "non, je veux dire qu'elle n'est plus parmi nous. plus de ce monde." il baisse le regard, fixant les feuilles de chou dans son bol. il ne voulait pas croiser le regard de surprise puis de tristesse de yunseo sinon il risquait d'être de nouveau submergé par ses propres émotions. "désolé de te l'apprendre que maintenant. c'était soudain."

Le débit rapide, Yunseo enchaîne les questions. Un petit rire quand il lui assure que sa vue ne lui fait pas encore défaut. Elle lève un sourcil, quand son visage prend un air plus sérieux et qu'il pose ses baguettes sur le côté de son plat. Est-ce qu'ils se sont séparés ? Yunseo n'espère pas, ils avaient l'air heureux ensemble, mais surtout, ça lui ferait de la peine de lui avoir rappelé leur rupture. Avant qu'elle ne puisse demander s'il y a un problème, Noyan prononce ces mots : Yerin est partie. Mots lourd, trop lourds. Mots qu'elle met un temps à comprendre. Les yeux de Yunseo s'écarquillent, elle ne comprend pas trop ce qu'il veut dire par là, mais ça a pas l'air joyeux. Puis il reprend la parole... « Hein ? » Les muscles de Yunseo se crispent soudainement, un sourire nerveux plaqué sur son visage. Quel genre de blague tordue c'est, ça ? Elle l'entend s'excuser, mais dans sa tête, c'est trop chaotique pour qu'elle puisse vraiment le comprendre. Yunseo s'enfonce dans sa chaise, secoue la tête, en signe de déni de la situation. Il a l'air sérieux. Elle essaie de comprendre, mais elle n'arrive pas. Tout ça lui rappelle Hyebin, alors quelques larmes se forment dans ses yeux, en un clignement d'yeux, elles sont parties. Comment elle avait réagi à la mort de Hyebin, déjà ? Des larmes, beaucoup de larmes, mais surtout, elle avait nié les choses. Elle s'était mise à sortir la nuit, à peindre plus, elle avait continué sa vie comme si jamais leur amitié n'avait existé. Un sourire apparaît sur ses lèvres. Elle n'a qu'à faire pareil. Elles n'étaient même pas si proches que ça, pourquoi était-elle aussi affectée ? « Désolée de l'apprendre. » Yunseo prend une voix douce, se voulant rassurante plus qu'autre chose. Il baisse le regard, comme s'il ne voulait pas voir sa réaction. Elle a envie de s'énerver un peu, lui demander pourquoi il n'a pas fait en sorte que tout le monde soit au courant, mais ça serait égoïste. Elle voudrait bien savoir la raison de sa mort, histoire de pouvoir réagir en conséquence, mais elle n'est pas sûre que ce soit une bonne idée. Du coup, elle essaie de changer un peu le sujet, aussi maladroit que ce soit. « Tu fais quoi ces jours-ci ? Tu vis toujours à Mapo ? » Elle se demande, parce que pour sa part, elle aurait sûrement déménagé, les souvenirs trop encrés dans l'endroit, selon elle. Il y a sûrement des gens dans ce monde qui seraient justement restés pour se sentir proches de la personne, mais elle trouve ça glauque. Laissez-les quitter ce monde, bon sang. Le deuil est censé être temporaire. Peut-être qu'elle est trop extrême, elle a conscience que dénier son deuil n'est pas sain non plus. Pour la personne qu'elle est, c'est juste le plus facile à faire. « Ton plat va refroidir, tu devrais manger. » La nourriture de la cafétéria est plutôt bonne, ça serait triste de la gâcher.

et la conversation continue aussi simplement que ça. pour les autres la tristesse était temporaire mais pas pour noyan. il ne pouvait pas réagir à la mort de yerin comme si on parlait de la pluie et du beau temps. certes, yunseo n'était pas aussi proche de yerin que lui mais il trouvait déconcertant la façon  dont les gens passaient de la tristesse à l'indifférence. peut-être que celui est déjà arrivé d'agir ainsi à la mort d'autre personne qui lui sont moins proches mais il s'en était surement jamais rendu compte. c'est fou comme l'être humain pouvait être égoïste, insensible à ce qui ne le touche pas de près. que faisait-il ces jours-ci? son quotidien était assez monotone. étude, boulot, dodo. il sortait beaucoup moins qu'avant, seulement lorsqu'il ne trouvait plus d'excuses pour éviter une soirée entre amis. il hausse les épaules d'un air non-chalant puis répond. "rien de spécial. le boulot et les études sont assez prenants." il regarde son plat, pas très appétissant à ses yeux mais il se force toutefois à reprendre ses baguettes. il fait mine de manger mais il joue plus avec sa nourriture qu'autre chose. "et oui, je vis toujours à mapo. je vois pas pourquoi je déménagerais." sa mère lui avait proposé de s'installer chez elle, ses amis avaient fait de même aussi mais il a refusé toutes leurs propositions. il ne voyait pas pourquoi il devrait déménager. des maisons où des meurtres avaient eu lieu se vendaient alors pourquoi devrait-il abandonner son appartement parce que sa copine y était décédé? il n'y avait rien à fuir. au contraire, il se sentait encore proche d'elle en y restant. il pouvait presque sentir son délicat parfum dans certaines pièces où elle avait l'habitude de passer le plus de temps. il aimait particulièrement passer du temps dans son dressing. la pièce que yerin adorait le plus. son long cardigan beige sentait encore comme elle. il n'était pas encore passé à la machine à laver depuis la dernière fois qu'elle l'avait porté. "t'en veux?" il montre les morceaux de porc dans son assiette. il ne pensait pas son estomac capable d'avaler plus. "je ne mange pas de porc." c'était évidemment un mensonge mais tout les moyens étaient bons pour se débarrasser le plus possible de la nourriture devant lui. "et sinon, t'as des cours le samedi? ou alors tu fais partie d'un club?" il fait mine de s'intéresser à ce qu'elle fait. après tout, c'était la moindre des choses après qu'elle lui ait demandé de ses nouvelles. et puis, moins la conversation tournait autour de lui et mieux il se portait.

Donc il vit toujours dans le même appartement. Yunseo grimace un peu, elle espère qu'il n'a rien vu. C'est difficile à comprendre pour elle, elle peut essayer, mais elle trouve ça glauque dans tous les cas. À son avis, il doit vraiment être mal pour pas y voir le souci. Surtout que ce ne serait pas difficile pour lui de déménager sur campus. Quand Noyan lui propose son porc, elle hoche la tête et le prend dans son assiette, mais elle est un peu étonnée. Pourquoi il prend du porc s'il n'en mange de toute façon pas ? Mouais, peut-être qu'il avait pas fait exprès. « Je vis aux dortoirs, c'est plus simple. » Les appartements sont plutôt petits, mais ça lui suffit, elle s'entend bien avec ses colocataires actuelles, même si elle a cru comprendre que sa camarade de chambre allait bientôt changer. La vue est belle, aussi. On voit la tour Namsan de sa fenêtre, quand il fait beau et qu'il y a pas trop de pollution. « Je suis présidente du club d'art sinon, mais on ne se réunit pas ce week-end. » Yunseo ayant l'habitude de manger vite, elle joue maintenant avec les quelques grains de riz qui restent dans son assiette. Elle hésite à dire une certaine phrase, mais ils se connaissent pas vraiment, alors elle ignore si ça serait déplacé. Puis merde. « Je sais qu'on se connaît pas trop, mais si t'as besoin de parler, j'suis là. » Elle-même, elle ignore si elle ment. Elle le regarde dans les yeux en disant cette maudite phrase, mais elle baisse son regard directement après. On le lui a dit aussi, ses parent eux-mêmes le lui ont dit. Je suis là pour toi, tu peux me parler, puis quand tu leur parles, tu vois l'ennui dans leur regard. pourquoi elle me parle celle-là ? Elle se dit juste que si c'est dit autant, c'est que ça doit faire du bien à certains. Objectivement y'a rien de mal à dire ça, c'est juste qu'en général les actions ne suivent pas. Peut-être que celles de Yunseo suivraient ? Elle essaierait, au moins. Yunseo ouvre la bouche, hésitante à dire quelque chose. Dans tous les cas, ça l'ennuiera, mais peut-être qu'il a besoin de l'entendre ? Elle avait remarqué comment il regardait son plat avant qu'elle arrive. Du dégoût. Elle, ça avait été le contraire, elle mangeait constamment, comme si son corps était convaincu que quelque chose n'allait pas, et qu'il essayait de prendre des forces. Elle voit peut-être des signes de déprime là où il n'y en a pas. Peut-être qu'elle abuse, peu importe. Aussi bien ils ne se reverraient jamais après ça. Le monde est grand, Séoul aussi. « J'ai déjà vécu le deuil, j'ai pas vu de psy ni rien sur le moment, mais avec du recul, j'aurais sûrement dû. » Elle devrait sûrement en voir un maintenant aussi. Quelle hypocrite.

parler? il l'a fait avec sa mère puis avec son grand-père et sa grand-mère mais personne n'avait réussi à le comprendre complètement. ils pensaient qu'il s'en remmettrait assez rapidement. après tout, il était jeune, avait la vie devant lui. certes, la disparition de yerin était soudaine et tragique mais ils le pensaient assez fort pour surmonter cette épreuve. voulaient-ils qu'il oublie yerin? qu'il efface son existence de sa mémoire pour qu'il puisse passer à autre chose? parce que c'est ce qu'il avait l'impression qu'on lui disait à chaque fois qu'on essayait de le consoler. donnez lui le temps de faire son deuil. c'est ce qu'il entendait dire mais il détestait cette phrase. la notion de deuil semble temporellement limitée. comme si après un certain nombre de mois ou d'années le chagrin disparaissait. le psy lui dira surement la même chose, lui demandera d'oublier, de passer à autre chose, lui conseillera de sortir plus souvent et de faire de nouvelle rencontre. ou pire encore, de remplacer yerin! est-ce que ça se voit tant que ça qu'il va mal? est-ce qu'il a l'air si déprimé que yunseo avait osé lui proposer de consulter un psychologue? il pensait avoir su masquer ses émotions. "pourquoi tu regrettes ne pas avoir consulté?" pourrait-elle le convaincre que c'était la meilleure solution? il ne voyait vraiment pas quelle différence cela pourrait faire. s'asseoir dans un cabinet pendant une heure et raconter à quel point yerin lui manque. le psychologue l'écouterait surement patiemment -il est payé pour ça après tout- mais il ne pourra jamais lui ramener sa yerin. alors à quoi bon? "je suis pas sur qu'un psychologue soit utile." il avale les quelques feuilles de chou restantes puis dépose ses baguettes. il ne comptait plus toucher le bol de riz à moitié entamé. la seule chose qu'il pouvait encore avaler était de l'eau, juste pour faire disparaître le goût de la nourriture de sa bouche. "je ne pense pas en avoir besoin. je vois pas comment un étranger pourrait comprendre ce que je ressens. pas l'émotion en elle-même mais son intensité." il n'y avait que lui pour comprendre ce qu'il ressentait vraiment. il n'était pas le seul à avoir vécu un tel drame mais les émotions restaient des sentiments personnels. tout comme chacun perçoit la vie à sa façon, chaque personne ressent les choses différemment. "cette personne te manque toujours? c'est pour ça que tu penses que tu dois consulter? pour t'aider à faire le deuil? parce que t'as pas réussi à oublier toute seule?"

Elle croise les bras et s'enfonce dans sa chaise, comme pour s'éloigner de la situation et réfléchir un instant. « Je sais pas vraiment, je suppose que j'aurais pu être aidée, c'est leur boulot. » Sur la défensive, le ton de la voix de Yunseo s'aggrave un peu. Il commente sur l'utilité d'un psychologue, puis dit ne pas en avoir besoin. Pire, il s'enfonce, en disant qu'un psychologue ne pourrait pas comprendre. Yunseo soupire, quel idiot. « Le principe d'un psy, c'est pas qu'il comprenne, c'est que tu comprennes. Que tu le veuilles ou non, tes réactions sont compréhensibles. T'es pas le premier à ressentir un tel deuil et tu seras pas le dernier. Un psychologue, c'est quelqu'un qui sait pourquoi t'es comme ça. Ils ont littéralement étudié ça. » Hypocrite à nouveau, Yunseo se permet encore de dépasser les limites. Si elle pouvait, elle dirait sûrement ces mots à elle-même. Yunseo n'a jamais passé le cap, jamais vu un psy. Yunseo sait qu'ils sont utiles, mais pour elle c'est admettre qu'elle a toujours des problèmes. C'est impossible pour elle, ça. L'enfant d'Hongdae ignore ses soucis, elle ne les confronte pas. Sur un bâteau, elle s'appréte à tomber d'une cascade et elle commente sur la beauté de la vue. Comme un gosse, Yunseo pense que si on ignore les choses elle disparaissent.  « Non, elle ne me manque pas particulièrement. C'est plutôt l'idée d'un monde où la mort n'existait pas qui me manque. » Pour une fois, c'est vrai. Elle y a réfléchi longtemps et quand Yunseo pense à Hyebin, elle pense qu'aux beaux souvenirs, pas la soirée qu'elles ont passé à pleurer quand elle ont appris pour son cancer. Objectivement, c'est pourtant le moment où leur amitié a prit un tournant, quand elle a arrêté d'être superficielle, aussi belle qu'elle ait toujours été. « Je suis pas psy, mais à partir du moment où t'es toujours dégoûté par la bouffe des mois plus tard, c'est plus du deuil, c'est de la dépression. » Yunseo devinait que ça faisait plusieurs mois, mais si ça se trouve elle se trompait complétement. Si ça coïncide avec l'arrêt de sa venue en cours, ça fait quasi cinq mois. « Je veux pas te blesser ni rien, mais on a beau pas vraiment se connaître, je connaissais un peu Yerin. Je sais pas comment elle est morte, mais elle a sûrement assez souffert, lui fait pas subir tes gamineries. Laisse là quitter ce monde et reposer en paix. »

elle parle, elle parle et elle parle. elle ne s'arrête pas. elle pense tout savoir. savoir de quoi elle parle. elle ose même lui diagnostiquer une dépression. non, elle ne connaissait pas yerin. elle ne connaissait pas yerin autant que lui. elle n'avait pas le droit de dire que sa souffrance n'était que des gamineries. que noyan l'empêchait de partir en paix. partir pour aller où? qui lui a dit que yerin aurait voulu quitter ses côtés? elle avait été arraché à ce monde! elle était beaucoup trop jeune pour quitter cet univers. yerin était pleine de vie, elle aurait voulu rester un peu plus longtemps sur cette terre. s'il devait faire un pacte avec le diable pour la ramener il le ferait, pas seulement pour lui mais aussi pour elle. parce qu'elle aimait la vie, qu'elle avait plein de projets en tête, qu'il lui restait tant de choses à accomplir ici. alors au diable les psychologues! au diable yunseo! noyan n'était pas dépressif. il n'était pas malade. ce qu'il ressentait était parfaitement normal, ce sont les autres qui ne le comprenaient pas. il rigole, mais ça n'a rien de joyeux, c'est amer, sombre, sinistre. "tu ne penses pas que tu dépasses un peu les bornes? on ne se connaît pas. yerin non plus ne te connaissait pas tant que ça. comment peux-tu te permettre de diagnostiquer un inconnu?" il croise son regard, le sien plein de dédain. cette fille avait de l'audace. un peu trop même. "mes gamineries? mes gamineries?!" il haussait le ton sans même s'en rendre compte, sa voix résonnant dans une partie de la cafétéria. "ben ouais ça se voit que t'es pas une psy si t'appelles la tristesse d'une personne des gamineries. tu sais quoi? ton conseil tu peux te le mettre là ou je pense puisque tu sembles en avoir tant besoin. de mon côté, ça ira." il commence à rassembler ses affaires et ranger son plateau repas, les gestes brusques, furieux. il repense aux paroles de la jeune femme. 'elle ne me manque pas.' 'un monde où la mort n'existait pas.' c'est bien ce qu'il pensait. elle n'était pas affectée par la mort de cette personne, elle voulait juste vivre de manière insouciante. croire que le monde était rose et que la vie ne lui réservait que de bonne surprise. elle considérait la mort de cette personne plutôt comme un inconvénient parce que celle-ci l'avait fait revenir à la dure réalité. "il semblerait que tu aies plus de problèmes à régler que moi. c'est toi qui pense encore comme une gamine. tu me penses enfoncer dans ma tristesse mais tu préfères fuir la tienne, n'est-ce pas? c'est aussi toxique que ce dont tu m'accuses." au moins, lui, il vivait ses émotions. il se sentira triste aussi longtemps qu'il voudra. parce que yerin mérite qu'on pleure sa mort aussi longtemps que possible et pas que l'on tente d'oublier son existence aussi vite que possible juste parce qu'on a peur de ressentir la moindre émotion négative. il se lève, son plateau en mains puis repousse sa chaise d'un coup de hanche.